Fabrice Raugi, artisan glacier : « J’ai confectionné tous mes sorbets avec de l’eau minérale corse de Zilia »

« J’ai la Corse et la glace dans le sang. Mes grands-parents paternels, Gina et Aladino, sont arrivés d’Italie en Corse, où ils se sont rencontrés, avant la Seconde Guerre mondiale. Ils sont devenus marchands ambulants, vendant trois ou quatre parfums de glace, ainsi que des petits sandwichs aux sardines.
Après la guerre, ils ont acheté un triporteur, puis une camionnette et ont fait le tour des villages du nord de la Corse. Les gens s’en souviennent encore. Puis ils ont acquis leur première boutique, dans le vieux Bastia, en 1937. Ils ne fabriquaient des glaces que l’été. L’hiver, ils proposaient plutôt de la tarte de pois chiches, des beignets à la farine de châtaigne (castagnacci), de la pizza, des gâteaux.
Le fiadone, ce merveilleux dessert à base de brocciu, c’était plutôt pour nous, leurs petits-enfants. Ma grand-mère Gina nous en préparait souvent, en saison, pour nous gâter. Tout comme les canistrellis, toujours disponibles dans une boîte en métal chez mon autre grand-mère, Cécile. Grâce à mes aïeules, je suis passionné de cuisine. J’adore les mets corses comme la soupe traditionnelle avec bouillon, légumes et croûtons ou les pâtes italiennes…
La boutique, c’est une histoire de famille. Mon père, Serge, a appris le métier avec ses parents et a repris l’entreprise lorsqu’ils se sont arrêtés. Il a fait évoluer les choses à sa manière, en développant la gamme de sorbets, d’entremets, de bûches, de bâtonnets glacés… Et il a rencontré ma mère, Christiane, en vendant des glaces sur la place Saint-Nicolas, à Bastia. Elle était si gourmande qu’elle prenait un cornet, faisait le tour du camion et revenait par l’autre côté. Elle avait 14 ans, lui 17. Ils se sont mariés quelques années plus tard, m’ont eu très jeunes et ont immédiatement travaillé ensemble.
Comme mon père, j’ai tout appris auprès de mes parents. Je passais mon temps à la boutique, j’y faisais mes devoirs en attendant qu’ils finissent leur journée. Je n’étais pas trop fait pour le milieu scolaire, j’ai arrêté en seconde, pour passer un CAP pâtissier et un CAP glacier. Cela m’a permis de découvrir un nouvel environnement, des métiers complémentaires très enrichissants. J’ai travaillé à tous les postes de l’entreprise familiale, pour apprendre à tout faire, connaître tous les rouages, être formé dans tous les secteurs. A mes 33 ans, mon père m’a cédé les rênes, j’étais prêt. Cela a toujours été une évidence pour moi de prendre la relève.
A mon tour, j’ai développé notre offre, en y incorporant de nouvelles saveurs, tout en conservant le savoir-faire artisanal de mes parents. J’ai priorisé la sélection de matières premières exceptionnelles, issues de producteurs locaux : la noisette de Cervione, les agrumes de l’île, clémentine, citron, pomelo, la fraise, le melon, les aromatiques (nepita, menthe, verveine, basilic…), et confectionné tous mes sorbets avec de l’eau minérale corse de Zilia. Aujourd’hui, nous proposons jusqu’à quarante-cinq références en été… L’idée n’est pas de tout révolutionner, mais d’évoluer dans la continuité de cette histoire générationnelle et gourmande. »
Raugi Glacier, 2 bis, rue Chanoine-Colombani, Bastia. Tél. : 04-95-31-22-31.
Camille Labro
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